© Radio France / CHRISTOPHE ABRAMOWITZ


Si je ferme les yeux, et si je laisse les émotions envahir mon esprit, la première chose à laquelle je pense à propos du VIe arrondissement, c’est à l’église de Saint-Germain-des-Prés et sa petite place, couverte de dalles inégales. Et juste en face, les Deux-Magots, un peu plus loin le Flore.

Cette géographie raconte la France, dans ses divisions et dans ses synthèses. La religion catholique, si profondément ancrée dans l’histoire commune, s’incarne dans le paysage grâce aux arêtes élégantes et sobres du lieu de culte édifié par des mains habiles à partir du Xe siècle.

En miroir de cette spiritualité, les deux bistrots célèbres représentent l’autre facette de l’esprit français, frondeur, raisonneur, émancipé et donc émancipateur. C’est ici, notamment, que se sont prolongées, tout au long des années soixante, les fièvres du quartier Latin tout proche, dans des discussions que l’on imagine pleines d’émotivité, à la recherche de la liberté individuelle.

Dans quelques mois, nous fêterons le cinquantenaire de Mai 68. Des sots, dont le nom commence parfois par Z, prétendent que ce joli mois de soleil a détruit la France. À sa manière, l’architecture de Saint-Germain dément ces analyses creuses parce que voisinent là l’ancien et le moderne, qui ont chacun apporté leur pierre à ce que nous sommes aujourd’hui, et dont nous pouvons être fiers.

Jean-Michel Apathie, journaliste