Parce que vous êtes de la race des irréductibles, votre smartphone est vierge de toute appli de rencontres. En toute naïveté, vous faites confiance au hasard pour trouver l’amour. Quittez donc cette foi dépassée en votre destin et forcez votre chance IRL (in real life) dans le quartier.

La méthode la plus efficace, de loin, pour faire des rencontres est celle dite du « dog appeal ». Le prérequis consiste à avoir un chien, quitte à passer vite fait en adopter un au chenil. Encore un samedi en solo ? Embarquez le canidé dans l’endroit autorisé, en bordure du jardin du Luxembourg, puis prenez un air alangui avant qu’on ne vous en fasse compliment ou qu’on s’informe de son âge. Vous serez populaire auprès soit de célibataires esseulés, soit d’un membre de famille monoparentale avec enfants qui demandera à le caresser. Dans les deux cas, l’indice de votre popularité sera au plus haut et votre 06 figurera sur le collier du cabot. Bien entendu, la terrasse de café reste un must pour engager la conversation. Le carrefour des Deux Magots voit passer plus de monde que le compte Instagram d’Emily Ratajkowski. Un air engageant, une chaise bien placée à vos côtés à céder et vous vous féliciterez enfin d’habiter un quartier touristique. Car ne refusez rien, en particulier à un étranger. Un numéro à contacter par WhatsApp et ce sont des voyages romantiques en perspective. Ne rêviez-vous pas justement de visiter New York ou Barcelone ? Surtout, prenez toujours le temps de renseigner un égaré venu, le pauvre, des tréfonds de la Rive Droite goûter les charmes de Saint-Germain-des-Prés. Voici pour vous l’occasion de sympathiser sans passer pour un(e) pervers(e) en faisant un bout de route. Le « Justement c’est sur mon chemin » pour accompagner autrui est le meilleur alibi pour engager la conversation. De façon générale, libérez votre parole. Traînez au bon endroit. Intello ? Rêvassez à la bibliothèque Mazarine. Hédoniste et gourmand ? Remplissez mollement un panier dans les allées de la Grande Épicerie du Bon Marché. Sportif ? Courez comme un dératé autour du Luco. Vous trouverez forcément votre alter ego. Enfin, si par malheur, rien de tout cela ne marchait, employez les grands moyens. Une nuit, entrez d’un pas ferme chez Castel. Et ­préparez-vous à en finir avec la barquette à décongeler pour une personne. Tant les solitudes les plus tenaces et effrénées ont souvent échoué face aux charmes old school des banquettes en velours rouge de l’établissement.

Anaïs Ferrand