C’est la star des hôtels germanopratins. Il nous faudra attendre l’été 2017 pour que le Lutetia, actuellement en totale rénovation ré-ouvre ses portes. Pour la première fois et en exclusivité pour Cerise, les dirigeants du groupe israélien Alrov nous ont fait entrer dans le futur palace et nous ont livré, avec son architecte Jean-Michel Wilmotte, les petits et grands secrets de ce lieu mythique de la rive gauche. Rideau.

Derrière sa façade classée et désormais bien cachée, se révèle un chantier monumental et de haute ambition. Un seul exemple, qui ravira les amateurs d’art : l’entrée principale renouera bientôt avec ses ornements d’origine, Art déco et Art nouveau. De même, les corbeilles de fleurs en pierre qui surplombaient le boulevard Raspail au début du XXe siècle, se verront reconstituées à l’identique. En revanche, on peut dire adieu aux stores bordeaux qui coiffaient chaque porte, à l’extérieur, mais tel est le choix du groupe hôtelier Alrov (Café Royal à Londres, Conservatorium à Amsterdam…) : rendre grâce et beauté à l’établissement tout en le faisant entrer de plain-pied dans la XXI° siècle. Crée en 1910, à l’instigation de l’entreprenante Madame Boucicaut, la propriétaire du Bon Marché, le palace du 6ème fut annexé par l’armée allemande durant l’Occupation. Ironie du sort, c’est aussi là que les familles de déportés se réunirent à la Libération dans l’espoir et l’attente de retrouver leurs proches. Marguerite Duras y passa des semaines d’angoisse.

Difficile de ne pas y penser, en franchissant ce seuil légendaire, foulé par tant de voyageurs du monde entier. La conciergerie comme la bagagerie sont en pleine résurrection, tout comme les deux salons mythiques de l’hôtel : le salon Borghèse – ses fresques reprennent des couleurs – et le salon Saint-Germain dont la verrière a fasciné tant de visiteurs. On parle aussi d’un jardin intérieur – ô calme, luxe et volupté – et d’une bibliothèque dont les étagères feront la part belle aux auteurs mythique de l’hôtel, de Gide qui y avait pris ses quartiers à l’année, à Albert Cohen qui y rédigea fébrilement Belle du Seigneur. Carrefour de tous ces espaces, la réception abritera deux ascenseurs panoramiques, conçus ex-nihilo. De là, direction les étages, où les futures chambres, au nombre de 231 avant rénovation, n’en compteront plus que 190, et seront par conséquent bien plus spacieuses. Il est d’ailleurs question de construire une suite, totalement inédite, dans un endroit encore inexploité de l’hôtel. Un suspense insoutenable… mais qui amuse beaucoup l’architecte Jean-Michel Wilmotte. Qu’on se rassure, en concluant notre visite un étage plus bas, il nous confie alors que le no man’s land de gravats et de poussière prendra bientôt l’apparence de salons privés et de salles de fitness. Six cabines de soins à la clef et au niveau inférieur, une piscine, un sauna et un hammam pour un SPA qui avoisinera les 700 m2 et qui sera ouvert au public. Ô joie !

Sarah Belmont, Jacques Ravenne et Carole Fernandez

Trois questions à Jean-Michel Wilmotte*

Ce jardin intérieur – une heureuse surprise – pourquoi un tel choix ?
Pour laisser pénétrer la lumière naturelle, ce qui permettra d’apprécier d’emblée la qualité des façades Art déco faites de grès émaillé, de cabochons en pierre, et de mosaïques. Un véritable régal des yeux.
Et les nouvelles chambres – elles sont très attendues – quel a été votre challenge personnel ?
Mettre en symbiose des matériaux naturels et modernes avec des références au style Art déco. Permettre à la clientèle de disposer d’un confort de technologie de pointe. Enfin, concevoir et créer des suites avec des artistes contemporains de renom.

A vous entendre, vous avez un véritable attachement pour le Lutetia ?
Dans mon métier, se rencontrer est essentiel. Et c’est toujours au Lutetia que j’ai eu mes plus beaux rendez-vous. Une histoire d’amour qui dure…

*On doit au fameux architecte nombre de designs à l’échelle internationale. À Paris, son nom est associé à LVMH (2004), au Collège des Bernardins (2008), ou à l’hôtel Le Mandarin Oriental (2011)